Chronique d’Herboristerie au Moyen-Age par Dame Aubree de Gui

Tiré de « L’Écho des Canton » no. 6, août 2000.

Extrait avec numérisateur et reconnaissance de texte.

Chronique d’Herboristerie au Moyen-Age

Par Dame Aubree de Gui

Introduction

Suivant I’exemple des arabes, surtout apres la periode des Croisades, les apothicaires europeens preparaient leurs breuvages et potions speciales a partir d’herbes, d’epices et de fleurs.

Des petits jardins d’herbes et de plantes medicinales avaient ete cultives en Europe depuis plusieurs siecles, mais Charlemagne (742-814) eut une grande influence dans Ie developpement des herbes. En 812, il commanda que de nombre de plantes utiles, anis, fenouil, fenugrec et lin entre autres, soient cultivees sur les fermes imperiales en Allemagne.

Au Moyen-Age, l’eglise s’occupait de la culture des herbes. La plupart provenaient des monasteres benedictins. La connaissance herbale medievale fut enregistree par Hidegarde de Bigen (1098-1179), une religieuse allemande reputee pour ses visions de ses propheties, qui fonda Ie couvent de Rupertsberg et ecrivit Ie traiM latin « Physica ». Au cours du Moyen-Age, les anciennes pratiques des herbes furent pratiquees par les presumees« sorcieres », qui n’etaient peut-etre que des sages femmes et emancipees, ce qui deplaisait a l’eglise du temps.

Pendant la periode de la grande peste, alors que plus d’un quart de la population du continent etait decimee, les herbes et les epices furent utilisees a toutes les sauces. Soupe a l’ail, vin de genevrier, sauge et thym, etc.

Le basilic

Au Moyen-Age, Ie basilic fut progressivement associe a l’a1chimie et a la sorcellerie (il permettait de reperer a coup sur les sorcieres). «Ainsi, la recolte de la plante s ‘accompagnait d’un rituel precis: I ‘herboriste devait purifier sa main dite profanatrice en l’aspergeant, a I ‘aide dl/un rameau de chene, de l’eau de trois sources difj’erentes, revetir des vetements propres et se tenir a distance des etres impurs, en particulier des femmes en periode de menstruation. Les instruments de fer, metal vii, eraient, bien entendu, proscrits lors de la cueillette. Les sorciers quirecherchaient eux aussi Ie basilic, procedaient egalement au ramassage avec un rituel qui etait en tous points oppose a celui que nous venons de relater. La Plante devait etre cueilUe la nuit, par une femme non vierge, de la main gauche, mise dans une chemise souiltee et coupee avec un couteau venant de servir a egorger un poulet noir ». (Pierre Ferran)

Le basilic est une herbe souvent ajoutee dans l’onguent dont les sorcieres s’enduisaient pour voler dans les airs (ce qui en realite serait plutot uneexperience de projection astrale).

La bourse-a-pasteur

Au Moyen-Age, on appelait la bourse-a-pasteur la Sanguinaria parce qu’on savait dejaqu’elle arrete les saignements comme aucune autre. La bourse-a-pasteur etait connue de Dioscoride, qui savait ses vertus hemostatiques. Son action sur I’uterus est connue depuis longtemps (Hypocarte).

Au Xle siecle, Bernard de Gordon, praticien celebre qui enseignait la medecine a Montpellier, dec1ara; « La bursa pastoris, que certains arrachent comme une mauvaise herbe, est Ie remede souverain des hemorragies. » Paracelse (1493-1541) attestait lui aussi du pouvoir coagulant de la plante en prescrivant pour arreter les saignements de malades des vertus vulneraires et astringentes.

La mauve

Platine, medecin repute du Moyen-Age, la conseille pour amollir Ie ventre, guerir la gravelle et rompre la pierre. La rosee aspiree sur la fleur par Ie nez etait panacee contre les migraines.

Une experience « speciale» consiste a faire uriner trois jours de suite une femme sur la mauve, si elle est fanee, la dame est sterile. Elle symbolise la douceur, la tendresse matemelle, la beaute delicate ou une declaration d’amour.

Charlemagne la voulait comme omement dans ses jardins imperiaux et elle etait omnipresente dans tous les enclos de pi antes medicinales des monasteres.

Hildegarde de Bigen, au Xle siec1e, la recommande uniquement en cataplasme ou en decoction, car elle affirme qu’elle est froide et contient des humeurs si epaisses et veneneuses et en fait naitre egalement chez I’homme! Elle ajoute: « elle est bonne pour les malades, que les biens-portants l’evitent!»

Platine, alchimiste du Moyen-Age, dit que la mauve guerit les lithiases et adoucit l’urine.

Le Pissenlit

Au temp medieval, on appelait Ie pissenlit la couronne de moine, Ie priest crown, qui vient du fait que dans ce temps la, on comparait les bons moines aux fleurs de pissenlit. « Quand Ie moine arrive, jeune, il est comme un bourgeon vert de pissenlit. Par la suite, il murit, rayonne comme la fleur epanouie. Puis, sa couronne devient blanche et eventuellement tombe »

Au Xe siecle, on parle enormement de pissenlit dans les journaux medicaux de l’Arabie. C’est vraiment un des premier endroits OU on en entend beaucoup parler. Apres, ça va plutot vers Ie XVe XVle siec1e. Pour Block, en 1546, Ie pissenlit est une plante diuretique par excellence.